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avril 2002  


Non à Chirac et Le Pen ! Dispersez les nervis du FN le 1er Mai !
Boycottez les élections du 5 mai ! 

1935–2002 : 
Le front populaire ouvre la voie 
à la réaction fasciste

Luttons pour la révolution ouvrière !

Il faut construire un vrai parti léniniste-trotskyste !

Les résultats du premier tour des élections présidentielles françaises ont envoyé les ondes de choc partout dans le monde. Après une campagne morne dans laquelle les candidats principaux de la droite et de la « gauche » ont présenté des programmes presque indiscernables, ceux qui sont sortis vainqueurs aux urnes sont le président sortant Jacques Chirac et le fasciste Jean-Marie Le Pen.  Le premier ministre « socialiste » Lionel Jospin a atteint le troisième place avec à peine un sixième des voix. Quand les premiers résultats ont été annoncé à la télévision, beaucoup des téléspectateurs ne croyaient pas leurs yeux. À Paris et dans d’autres  villes, des milliers de jeunes se sont précipités dans la rue pour dire « non à Le Pen ». Les protestations se sont gonflées par des dizaines de milliers de personnes et ont continué pendant toute la semaine ; des manifestations de masse sont prévues pour le 27 et 28 avril, et le 1er mai. Entre-temps, les appels se multiplient pour obtenir le score le plus grand possible pour Chirac au deuxième tour, le 5 mai. Mais un vote pour tout candidat d’un parti bourgeois ou d’une coalition de collaboration de classe n’arrêtera pas la menace fasciste. Il faut mobiliser la puissance de la classe ouvrière pour boycotter le cirque électoral de la bourgeoisie et balayer les nervis du capital.

Les jeunes, les immigrés et les ouvriers conscients sont scandalisés par le score sinistre du Front National fasciste, et avec raison. Le Pen et ses sbires ne sont pas un « courant d’opinion », mais le paravent politique pour les troupes de choc de la réaction raciste qui veulent anéantir les immigrés, la gauche et le mouvement ouvrier. Il faut les écraser avant qu’il soit trop tard. Mais le désir tout à fait légitime de barrer la route à ces tueurs racistes est en traîne d’être manipulé en faveur du droitier Chirac, notoirement corrompu, au nom de la « défense de la République ». « Votez pour l’escroc, pas pour le facho » peut-on lire sur des pancartes. La Ligue pour la Quatrième Internationale met en garde contre l’appel pour un « front républicain » contre le Front national. Chirac mettra en pratique une bonne partie du programme réactionnaire de Le Pen, tout comme le réformiste Jospin a fait sien le thème la « sécurité » (mot de code pour les attaques policières contre les jeunes et les immigrés sous prétexte de combattre le « crime »).

Les travailleurs, les immigrés et les jeunes doivent dire non à Chirac et Le Pen et rompre avec les réformistes sociaux-démocrates et pseudo-communistes qui ont frayé la voie pour cette poussée à droite. La réponse au danger fasciste ne se trouve pas dans un vote pour un président conservateur insigne ou dans la construction d’une « gauche unie » pour les législatives. Les « fronts populaires » des partis ouvriers réformistes avec des petites formations bourgeoises de « gauche » comme les Verts ou les Radicaux de gauche ne serve qu’à enchaîner les travailleurs et opprimés à leur ennemi de classe. Les ouvriers conscients par contre doivent construire un parti ouvrier révolutionnaire sur la base du programme bolchevik de Lénine et de Trotski. La prochaine fois que Le Pen cherche à faire défiler ses nervis racistes – le 1er mai, quand les unités paramilitaires du FN marchent de façon provocatrice sous le symbole nationaliste de Jeanne d’Arc en opposition à la journée internationale des ouvriers – la vermine raciste doit être balayé des rues de Paris par la force écrasante des ouvriers organisés ! Et le jour même du vote, il devrait avoir des manifestations et grèves ouvrières pour répudier la farce électorale capitaliste qui offre la « choix » entre deux millionnaires réactionnaires.

Les résultats du premier tour sont une gifle étourdissante au gouvernement de front populaire qui a gouverné la France depuis cinq ans. Tout comme le gouvernement de « New Labour » de Tony Blair en Grande-Bretagne, le gouvernement de la « gauche plurielle » de Jospin a mis á l’exécution le programme de la droite. Jospin a réalisé plus de privatisations que son prédécesseur conservateur Balladur, il s’est joint aux USA et à l’OTAN pour mener la guerre impérialiste contre la Yougoslavie et l’Afghanistan, et a déchaîné la persécution policière des immigrés et jeunes dans les HLM des cités de banlieue symbolisé par l’opération Vigipirate. Le vote pour Chirac et Le Pen fait partie aussi d’une vague droitière partout dans l’Europe : les partis fascistes sont introduits dans des gouvernements de coalition en Autriche et en Italie, il y a aussi les forts scores pour les partis du chauvinisme « anti-étranger » virulent en Suisse et en Danemark. Aux Pays-Bas le parti du bouffeur d’immigrés Pim Fortuyn menace de faire une percée dans les législatives prochaines. Et avec la multiplication de scandales de corruption, la voie est préparé pour une nouvelle « affaire Stavisky », comme au début des années 30, quand les milices fascistes et royalistes se sont réunis pour attaquer les ouvriers et la gauche.

Derrière cette poussée dangereuse de la réaction on trouve la persistance du chômage à plus de dix pour cent pendant plus d’une décennie dans une grande partie de l’Europe sous les sociaux-démocrates ou des gouvernements front-populistes de gauche. Alors que la colère montait parmi les ouvriers, les jeunes, les enseignants, les chômeurs et d’autre secteurs durement frappés, tous les partis du gouvernement Jospin ont subi des pertes dans le premier tour du 21 avril. Le parti communiste réformiste, dont le score a tombé à moins de 3,5 pour cent, est en train de disparaître. Au même temps les trois candidats qui réclament (faussement) du trotskysme ont rassemblé ensemble plus de 10 pour cent des voix. Mais les plus d’un million de voix chacun pour Arlette Laguiller de Lutte ouvrière (LO) et pour Olivier Besancenot de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), et la candidature du Parti des travailleurs (PT) ont été, non pas une opposition révolutionnaire au front populaire de collaboration de classe, mais plutôt un vote de protestation destiné à « envoyer un message » à Jospin & Cie., à faire pression afin qu’ils reviennent à gauche. Ces candidatures n’ont pas présenté une opposition de classe à la guerre impérialiste et sont front intérieur (la campagne « sécuritaire ») ; tout au plus, ils préconisaient une politique plus « sociale » et « indépendant » de l’impérialisme français (voir notre article, « Elections de guerre raciste en France »).

Le gouvernement de la « gauche plurielle » fut mis en place pour drainer la combativité ouvrière qui a explosé de façon dramatique dans les grèves de masse de décembre 1995. C’est là l’histoire d’un siècle de front-populisme, de Millerand au début du vingtième siècle à Mitterrand et Jospin à la fin du siècle. Comme nous avons écrit dans notre article « Le front populaire enchaîne les ouvriers » (The Internationalist [en anglais] No. 2, avril-mai 1997) :

« En vérité, de telles coalitions avec la bourgeoisie – le cas classique étant le front populaire aux années 30 – servent surtout d’étrangler les luttes des ouvriers et opprimés contre leurs exploiteurs et oppresseurs. Loin de barrer la route aux fascistes, le front populaire fait barrage à la révolution, et prépare ainsi la voie pour la victoire de la réaction capitaliste. Défendant le principe marxiste de base de l’indépendance politique de la classe ouvrière, les trotskystes appellent à l’opposition prolétarienne au front populaire et aucune vote pour un candidat quelconque d’une coalition de collaboration de classe. »
Dans les années 30, le cabinet front-populiste de Léon Blum a dissipé l’énergie révolutionnaire de la grève générale de 1936 ; neuf mois plus tard la police a massacré des manifestants anti-fascistes à Clichy. Alors que la désillusion se répandait parmi les ouvriers, le premier ministre socialiste Blum dut céder la place au radical bourgeois Edouard Daladier, qui à son tour fut remplacé par la dictature bonapartiste du Maréchal Henri-Philippe Pétain. Aujourd’hui Jospin cède la place à Chirac, et Le Pen s’attend dans les coulisses.

L’ancien para et tortionnaire de combattants pour l’indépendance algérienne Jean-Marie Le Pen est un admirateur déclaré du régime pétainiste à Vichy, allié à Hitler pendant la IIe Guerre Mondiale. Le Pen glorifie la trinité « Travail, Famille, Patrie » – la devise de l’« État français » du maréchal qui remplaça la Troisième République et « Liberté, Fraternité, Égalité ». Le Führer du FN a aussi déclaré notoirement que le Holocauste nazi des Juifs n’était qu’« un détail de l’histoire », au même temps qu’il proclame l’« inégalité des races ». Le programme du Front National veut autoriser l’usage des armes à feu lorsque un policier se sent « menacé », veut réintroduire la peine de mort, se prononce à faveur de l’« expulsion effective des immigrés clandestins » et déclare que « L’immigration légale sera totalement interdite en France. » Au nom de la défense de la souveraineté nationale il a fustigé le « mondialisme », veut réclamer « l’Acadie, le Québec et la Louisiane » de la zone d’influence anglo-saxonne, et veut « constituer une garde nationale de volontaires » (c’est-à-dire, des troupes d’assaut). Dans les zones où l’influence du FN a avancé, il y a eu aussi des attaques contre synagogues et cimetières juifs, de même que des attaques contre des immigrés nord-africains. Bref, le danger fasciste représente Le Pen est bien réel.

Léon Trotsky avertit dans son texte « La France à un tournant » (mars 1936) : « Le Front populaire, complot de la bureaucratie ouvrière avec les pires exploiteurs politiques des classes moyennes, est tout simplement capable de tuer la foi des masses dans les méthodes révolutionnaires et de les jeter dans les bras de la contre-révolution fasciste. » Peu après, en juillet 1936, alors que les franquistes se soulevaient contre le Front populaire espagnole, Trotsky avertit aussi contre ces centristes et réformistes gauchisants qui « écoul[ent] leur camelote dans l’ombre du Front populaire ». Aujourd’hui les crétins parlementaires de LO, la LCR et la PT veulent se positionner sur les franges du front populaire actuel, et quand celui-ci s’épuise, le résultat en est l’ascendance du fasciste Le Pen. La Ligue pour la Quatrième Internationale avait signalé ce danger quand nous nous refusions de donner un appui électorale, si « critique » que se soit, aux candidats pseudo-trotskystes, dont les programmes consistaient de pousser Jospin et Cie. vers la gauche. Au contraire, il faut préparer une lutte révolutionnaire pour remplacer le gouvernement bourgeois parlementaire de la « gauche plurielle » avec un gouvernement ouvrier basé sur les conseils ouvriers (soviets).

Aujourd’hui les formations pseudo-trotskystes se tordent parce que leurs petits jeux ont mal abouti. La plupart des critiques envers eux sont entièrement cyniques : tels les diatribes du ex-maoïste Serge July, directeur de Libération, contre Laguiller quant à une manque supposée de loyauté envers la « démocratie », à cause du fait que LO prétend toujours défendre la dictature du prolétariat ; soit le blâme du Parti communiste, qui accuse les trotskistes d’ouvrir la porte aux fascistes pour avoir présenté des candidats à l’élection présidentielle (le PCF avait aussi son propre candidat). Maintenant le PS est déchiré par des rivalités internes ; le PCF est mis en faillite (à la fois financièrement et politiquement) et moribond ; et LO, la LCR et le PT battent le pavé pour organiser des manifs « anti-fascistes » pour augmenter le score électorale de Chirac. Laguiller commence sa déclaration sur le deuxième tour : « Je n’appelle pas à l’abstention au second tour de l’élection Présidentielle… » Ça veut dire, votez…qui ? Elle ne le dit pas, mais tout le monde peut déchiffrer son appel. LO appelle à « participer largement » aux manifestations contre Le Pen et l’extrême-droite, mais insiste qu’elle se refuse à cautionner celles qui « auraient pour but soutenir Chirac ou à participer à un quelconque front républicain ». Mais, c’est là précisément le but de toutes les manifestations, qu’elles le proclament ouvertement ou non.

Pour sa part, le Bureau politique de la LCR, dans une déclaration du 22 avril, signale que le vote Le Pen constitue un « seisme politique » qui cause un « traumatisme pour des millions de gens ». Elle termine avec l’affirmation que « Nous comprenons les électeurs qui votent Chirac pour s’opposer Le Pen », bien que la LCR n’estime pas que Chirac soit le « rempart » dans la bataille contre l’extrême-droite. La LCR condamne le chef du FN pour son appui aux privatisations, à la législation anti-sociale, mais ne dit rien sur ses attaques racistes contre les jeunes et les immigrés. Avec leurs appels à un nouveau « parti des travailleurs » (ou du « monde du travail »), LO et la LCR font la chasse aux anciens électeurs du PCF qui ont voté Le Pen. Dans les manifestations sous le mot d’ordre « Tous ensemble contre Le Pen », ils organisent un appui extra-parlementaire au « Front républicain » en faveur de Chirac, avec une feuille de vigne transparente d’« indépendance » vis-à-vis le candidat du grand capital. Alors que Jospin met en garde contre de la violence dans les rues si les manifs continuent, les partis de l’« extreme-gauche » domestiquée n’appellent pas du tout pour chasser les nervis de Le Pen. Nous, par contre, faisons appel pour disperser les bandes fascistes et boycotter ces élections bidonnes.

Ce qui se passe en France aura des répercussions au travers de l’Europe. Si des bataillons ouvriers nettoient les rues de Paris des DPS et UMI, les armées privées du Front National, s’il y a des manifestations et grèves contre la farce électorale le 5 mai, on sentira l’impact immédiatement en Italie, par exemple, où plus de trois millions de travailleurs ont fait grève et ont manifesté contre les mesures brutalement anti-ouvrières du gouvernement droitier du magnat des médias Berlusconi et le fasciste Fini. Mais s’il y aura une dizaine de jours de manifestations suivie d’un grand vote pour Chirac, cela renforcera à la droite réactionnaire. Surtout, la banqueroute du PCF et du PS, avec ses légions d’ex-pseudo-trotskystes, et la politique de pression suiviste de LO, la LCR et le PT soulignent la nécessité de construire un vrai parti léniniste-trotskyste de l’avant-garde prolétarienne. Des références vagues à un « parti des travailleurs » ne peuvent que signaler un pot-pourri de toute sorte d’opportuniste et un programme minimum réformiste. Un tel parti pourrait offrir un abri pour des soixante-huitards en préretraite, mais ne peut pas diriger la classe ouvrière multiethnique de la France et l’Europe dans une lutte révolutionnaire pour le pouvoir. Un parti communiste authentique qui se batte pour les Etats-Unis socialistes d’Europe doit être construit dans le combat pour reforger la Quatrième Internationale, parti mondial de la révolution socialiste.

26 avril 2002


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